Plateforme d'Enquêtes Militantes

TOUT LE MONDE DETESTE LA START-UP NATION !

7 Juin 2018Par Plateforme d'Enquêtes Militantes0 commentaire

Une visite de courtoisie à la station F aux cris de « Tout le monde déteste la start-up nation »

 

Après la manif lycéenne et étudiante qui a ouvert cette journée de lutte du jeudi 7 juin et une manif interpro qui s’est prolongée par l’envahissement des quais de la gare de Montparnasse, deux cent travailleur.se.s en lutte, chomeur.se.s, précaires, étudiant.e.s et lycéen.ne.s ont bièvement occupé la Station F, la plus grande pépinière de start-up au monde. À l’arrivée des très nombreuses forces de police mobilisées à cette occasion, les manifestants avaient déjà quitté les lieux. Aucune arrestation pour « attroupement armé », détention de lunettes de piscine ou instruction en cours sur l’assassinat d’Henri IV n’a donc eu lieu à cette heure.

 

 

Dans le 13e, au bord du métro aérien, une ancienne gare hors-service, autrefois propriété de la SNCF, remise à neuf par le magnat de la télécommunication Xavier Niel, patron de Free mobile : la « plus grande pépinière de start-up au monde ».

Inaugurée le 29 juin 2017, au lendemain de sa prise de fonction, par Emmanuel Macron, avec un discours provocateur, qui cristallise l’idéologie de la « start-up nation », devant deux mille cadres dynamiques des plus grosses boites du tertiaire avancé mais aussi d’armement, provenant des quatre coins du monde : BNP, Thales, Orange, Google, Apple, Facebook, Amazon, etc.


Quel meilleur lieu pour un envahissement après une manif auto-organisée, réunissant travailleur.se.s mobilisé.e.s, étudiant.e.s, précaires, chômeur.se.s ?

 


Macron l’a rappelé lors du discours d’inauguration de cet espace hautement emblématique : entreprenariat et gouvernement mènent un même combat. Mais nous aussi, celles et ceux qui portent une lutte dont la gauche populiste ne veut pas entendre parler, sommes engagés dans un combat contre cet hydre à mille têtes.

 

Entrepreneur is the new French, a osé affirmer Macron ici-même. Même Macron même combat ! lui répondons nous. L’« immense ambition », les « rêves illimités », la détermination de notre génération, toutes ces choses qu’il a invoqué devant les anciens et les nouveaux riches nous conduisent en effet à affirmer : tout le monde déteste la start-up nation ! 

 


Car nous attribuons une toute autre signification à cette volonté de dire « je décide pour moi », « j’écris moi-même ma vie ». Ici, l’été dernier, il a été dit que les gares sont un lieu de transit, un lieu de passage, où l’on fait des rencontres, dans un esprit d’ouverture vis-à-vis des autres, prêts à explorer le monde. C’est dans des lieux comme celui-ci, que se coaguleraient les envies et les désirs de faire bouger les choses, de changer la société, et pour longtemps. C’est dans ces lieux que peuvent se rassembler les intelligences et les énergies. Prenons-le au mot ! Macron a raison : aujourd’hui les étudiant.e.s, les chômeur.se.s et les précaires, les travailleur.se.s vénères et les autonomes qui aiment les « surenchères », convergent ici pour signer une alliance à égalité.


Car le signal est donné : il est grand temps de reconnaître que la pluralité de nos luttes - syndicales, antiracistes, féministes, de la jeunesse précarisée - ont un ennemi commun. Il ne s’agit pas, bien évidemment, de les juxtaposer, mais de partir de leur autonomie respective, de les faire grandir ensemble, les unes avec les autres. C’est seulement à partir du renforcement réciproque de ces luttes que l’on pourra espérer bouleverser les rapports de force.
 


Nous sommes donc ici, dans ce lieu mystique ou l’État et le grand capital ont célébré leur sainte alliance en toute transparence, pour en finir avec les appels creux à la convergence des luttes, et passer aux actes. Non plus se limiter à une, deux, dix belles manifs ; mais pour implanter des formes d’auto-organisation capables de se reproduire dans le temps et de proliférer dans l’espace, bien au-delà des séquences du mouvement social, pour faire en sorte que grèves et manifestations, blocages et occupations fleurissent partout.


Dans ce temple du capitalisme de plateforme qui symbolise le pouvoir et l’idéologie macroniennes, nous le (re)disons haut et fort : nous ne serons jamais des winners, connard !
 

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